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LA  PEUR

Nouvelles

(1977)

ISBN : 2-243-01638-9

Les nouvelles de ce recueil furent écrites entre juin et décembre 1977. J'habitais à cette époque une maison face à la mer, secouée sans cesse par le vent et détrempée par les embruns. Elle portait très justement le nom de "Hurlevent".

Le compositeur Karlheinz Stockhausen m'avait proposé en mai 1977 de devenir son assistant et j'avais pris une année sabbatique (de juillet 1977 à septembre 1978) afin de me préparer à cette extraordinaire proposition qui avait totalement enflammé l'esprit du jeune homme de 22 ans que j'étais. Hélas, je devais rapidement déchanter et me rendre à l'évidence : mon enthousiasme et ma passion pour sa musique ne pouvaient pallier mes lacunes en solfège et faire de moi l'assistant d'un compositeur. J'étais à cette époque totalement incapable de lire une partition. Je dus donc décliner la généreuse et honorifique proposition de Stockhausen...

Cette année devait cependant, malgré cette déception, être marquée du sceau du compositeur puisque je fis partie des stagiaires du Centre Sirius que Stockhausen anima au Conservatoire Darius Milhaud d'Aix-en-Provence (du 21 juillet au 8 août 1977) ; je suivis ensuite en novembre de cette même année (du 6 au 18), au centre culturel André Malraux de Rueil-Malmaison, les répétitions et la création mondiale de la version d'Inori que Stockhausen avait composée pour l'Ensemble Intercontemporain. Pour conclure majestueusement cette année, je devais prendre le train le 28 décembre pour me rendre à Kürten, chez Stockhausen, afin de mettre en chantier l'écriture de SHU.

Mais je ne consacrai pas cette année uniquement au compositeur allemand et écrivis parallèlement les nouvelles de La Peur.

Ce recueil était originellement constitué de dix nouvelles et de neuf pages centrales de photographies (montages de photos d'actualité et de slogans publicitaires). Je devais, pour l'édition en 1981, écarter le premier court texte, La Douleur - dont je n'étais d'ailleurs pas l'auteur et qui avait été écrit par ma première épouse - ainsi que les cinquième et sixième nouvelles, L'Attente et La Nuit. L'Attente s'appuyait sur ma courte expérience du Service National en janvier et février de cette année (je fus réformé après un mois d'incorporation et un mois d'hôpital) et son anti-militarisme primaire me poussa trois ans plus tard à ne pas le retenir pour l'édition définitive. Les pages centrales de photographies furent abandonnées pour des raisons financières.

Ne restèrent donc que les sept nouvelles suivantes :

La Fenêtre étroite

Les Griffes

Le Nouveau

La Fuite

La Peur

Paredon

La Médiation

Ces nouvelles ont toutes comme thème l'irruption d'un élément étranger et déstabilisant dans le quotidien, déclenchant un sentiment d'angoisse et d'insécurité. Elles reflètent également mes phobies de cette époque : la chasse (Les Griffes), le totalitarisme (Le Nouveau et Paredon), l'insécurité et la violence (La Fuite), et mes angoisses existentielles (La Peur et La Médiation). Leur climat oscille entre le fantastique et la poésie.

Dans La Peur réapparaît le personnage du prêtre amoral déjà esquissé dans Paysage de hasard. Il me fut inspiré par un ecclésiastique que j'avais connu et dont le peu de respect envers ses voeux d'abstinence et de pauvreté avaient choqué mon esprit idéaliste. Il était le propriétaire de la maison que j'habitais face à la mer et il devait à la fin de cette année m'en expulser afin d'y loger une de ses maîtresses.

Paredon (dédié à Julio Cortazar) fut inspiré par une jeune femme argentine, réfugiée politique, rencontrée à Paris en novembre 77, alors que je suivais les répétitions d'Inori de Stockhausen.

Pour écrire La Médiation, j'avais rassemblé une douzaine de photos découpées dans des magazines et j'avais construit un fil conducteur qui les reliait en une sorte de vagabondage poétique. La vie est parfois construite ainsi, mais le fil y est encore plus difficile à saisir.

 

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